A propos de l'Algerienne reduite en esclavage en Arabie Saoudite


Deux mois après la publication du calvaire de Baya, une jeune Algérienne exploitée en Arabie Saoudite, l'institut de beauté qui l'employait, l'Or de Lys, réagit pour accuser Baya d'être sous-qualifiée.

" C'est sur insistance d'autres employées de l'institut de nationalité algérienne et qui, touchées dans leur dignité par les assertions malveillantes contenues dans cet article, souhaitent le rétablissement de la vérité (...) », écrit la direction de cet institut que la jeune Algérienne a accusé de mauvais traitements et de l'avoir pratiquement réduite à l'esclavage. La direction de cet institut mis en cause par le témoignage cru de Baya estime que cette dernière « a signé à Alger un contrat de travail, en qualité de professeur d'aérobic, en prétendant sur son C.V. être diplômée d'aérobic et de natation. Ce contrat lui a été envoyé d'Arabie Saoudite par une secrétaire de notre institut, qui est algérienne, et qui préalablement l'avait questionnée sur ses références et diplômes ». l'institut en veut pour preuve que « Baya n'avait aucune éducation sportive et que ses diplômes étaient fantaisistes; ceci d'ailleurs grâce à d'autres de ses compatriotes qui, elles, ont de vrais diplômes » avant de poursuivre que Baya a refusé l'éventualité de revenir en Algérie et que l'institut lui proposa un poste de secrétaire à la réception contre un salaire de 2 000 saudi riyals par mois et un nouveau contrat. Qualifiée « d'aigrie » à cause de son témoignage, Baya est pourfendue par son ancienne employeuse qui oppose les autres Algériennes demeurées à Djeddah : « Pour notre part, nous faisons la part des choses et nous maintenons notre confiance à toutes ces Algériennes qui travaillent dans notre centre et aux autres, nombreuses, qui postulent à ce poste ».

S'agissant de la personne qui a recruté Baya, en l'occurrence Wahiba, la direction de l'institut stipule que cette dernière a travaillé honnêtement pendant plusieurs années dans notre centre comme coiffeuse et c'est grâce à ses économies laborieusement acquises qu'elle a pu ouvrir un salon de coiffure et s'offrir un logement à Alger, après son retour ». Baya avait accusé cette propriétaire d'un salon de coiffure d'organiser des déplacements vers l'Arabie Saoudite dans le cadre de réseaux de recrutement qui ciblent des femmes algériennes, de préférence « jolies et grandes de taille » pour des emplois qui s'avèrent fictifs au royaume wahhabite.

Mais dans cette réponse de l'Or de Lys, luxueux institut de beauté de Djeddah, dont la propriétaire est l'épouse d'un prince cousin de la famille royale, la direction omet de parler du fond du témoignage de la jeune Algérienne qui a d'abord et surtout dénoncé le traitement dégradant et humiliant qu'on lui a fait subir durant ces deux mois de quasi captivité. La configuration du passeport de Baya, qui n'a été récupéré qu'un mois après son évasion de l'institut, par le consul algérien de Djeddah après d'âpres négociations avec la propriétaire du centre, témoigne des méthodes peu communes de l'Or de Lys.

Aucune réponse n'est apportée au rationnement alimentaire, au refus des soins médicaux, aux conditions d'hébergement insalubres, aux insultes, vexations, coups et autres humiliations qu'à subis Baya durant ce séjour carcéral. Contactée, la jeune Algérienne persiste et signe et se dit même prête à être confrontée à ses anciennes employeuses : « J'ai apporté ce témoignage par acquit de conscience. J'aurais pu me taire car j'étais déjà tellement heureuse de rentrer en Algérie mais j'ai d'abord pensé aux Algériennes restées là-bas. Je ne déteste personne et je n'ai pas de rancune personnelle et je connais trop bien les pratiques de cet institut pour savoir que les Algériennes y travaillant ne sont pas libres et sont traitées comme du bétail.

La majorité n'osent pas parler car elles ne peuvent pas rentrer en Algérie du moment qu'on leur a retiré leurs passeports et sont vulnérables.

D'autres filles, et je les comprends, ont des familles dans le besoin et continuent à travailler. Pour ma part, je ne changerais rien à mon témoignage sur ce sujet car c'est la stricte vérité. Je paie encore ce séjour et il m'arrive de voir un psy car je n'arrive pas à me remettre psychologiquement de cette histoire », dira-t-elle.

Le Quotidien d'Oran Dimanche 26 septembre 2004
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